Du coton au tissu, une tradition, qui résiste au temps

Quand nous arborons notre pagne tissé, riche et noble tisséu traditionnellement tissé à la main, appelé affectueusement ‘’lokpo’’ au Togo, ou nos tenues faites des tissus tissés, nous ne nous soucions guère du travail qui a été abattu.

Nous devrions être contents de porter avec fierté des produits passionnément et faits main avec une attention particulière.

Nous voulons ensemble retracer le processus de l’art du tissage en partant du coton au produit fini qu’est le tissu avec lequel nous confectionnons nos vêtements, etc..

Dans cet article, nous irons à la découverte d’un métier formidable. Un métier dont seule la passion et l’amour du travail uniquement vont y maintenir. Un métier qui malgré l’industrialisation, traverse le temps et l’espace et s’impose à des moments donnés du fait de la particularité et de l’ingéniosité des personnes qui s’y adonnent.

Nous vous faisons donc voyager de l’univers du métier de l’art du tissage à travers le quotidien du tisserand Monsieur Abel Mama SOUMANA à Dapaong.

La passion d’un tisserand

Depuis 17 ans, Monsieur Abel Mama SOUMANA, fondateur du Centre Artisanal et de Formation en Tissage (CAFTIS) à Dapaong, cherche de toutes ses forces de perpétuer une noblesse, une tradition, un métier en voie de disparition, un travail fait minutieusement à la main du temps des ancêtres.

Il travaille à transmettre les techniques traditionnelles du tissage. Mû par sa passion, Abel, le tisserand au cœur d’or, ne décolère pas face aux assauts du textile qui est en perpétuelle industrialisation. Le tisserand de la technique traditionnelle, se rend disponible et cherche par voie et moyens d’égaler les industries textiles afin de bannir ce problème de production artisanale qui poussent les acheteurs vers les industriels.

Mais comment du coton, Monsieur Abel SOMANOU, notre féru tisserand parvient-il à avoir des tissus ?

Du coton au tissu tissé

‘’Le coton passe en une usine de filature ; une fois sorti d’usine en pelotes ou en bobines, nous décidons et embobinons, ourdissons après avoir passé la chaîne, le placement dans les lices et peignes et après s’ensuive le tissage proprement dit pour le rendu du tissu tissé artisanal.’’, explique Monsieur Abel Mama SOUMANA.

Le processus du tissu

Autrement dit, pour avoir un tissu tissé artisanal, il y a tout un processus à suivre. Ainsi, après la récolte du coton, on passe à l’égrenage qui consiste à détacher les graines du coton. S’en suit l’étape de filature ; pour former un fil, les fibres du coton passent par les étapes suivantes :

  • l’ouvraison : les fibres sont livrées en balles comprimées puis elles sont décompactées grossièrement en flocons;
  • le battage: grâce à cette action, les flocons de fibres sont une première fois démêlés et les dernières impuretés solides et débris végétaux éliminés ;
  • le cardage: le brossage mécanique des flocons de fibres permet d’individualiser et de paralléliser les fibres en plus d’éliminer les dernières impuretés. On obtient un ruban de fibres assez régulier. A cette étape, des fibres d’origines différentes peuvent être mélangées.
  • le doublage et l’étirage: avec plusieurs passages, ils permettent d’améliorer la parallélisation des fibres et de régulariser la grosseur du ruban de fibres. A cette étape, des rubans d’origines différentes peuvent être mélangés ;
  • le peignage: il permet de former un ruban de fibres longues en sélectionnant les fibres du ruban en fonction de leur longueur, fibres courtes et débris étant éliminés ;
  • l’étirage: les rubans sont étirés et affinés pour se présenter en « fromages » soit en rondelles ;
  • la filature ou le continu à filer: le ruban est encore étiré pour obtenir un fil qui s’enroule sur des bobines. Une torsion des fibres permet de garder une cohésion ;
  • le guipage: il consiste à enrouler un fil autour d’un autre fil support ;
  • le bobinage: il a pour but d’obtenir une quantité maximale de fils sur un même support en réunissant plusieurs fils simples ou fils retors.

La beauté de tout ceci réside dans le fait toutes ces techniques se pratiquent à la main et de façon artisanale. Et une fois les fils sont prêts, le tissage commence. Et comme le renseigne Monsieur Abel SOUMANA, c’est un travail de longue haleine. Pour avoir du tissu, il faut encore suivre une suite d’étapes :

Les étapes du tissage

  • l’ourdissage: c’est la préparation des fils de chaîne ;
  • l’enfilage: l’union, la mise en place, des fils de chaîne avec le métier à tisser ;
  • le tissage proprement-dit, la trame vient se mélanger aux fils de chaîne pour générer le tissu naît.

Il va sans dire qu’en plus de la passion, il faut au tisserand de la patience et de la méthode, sans compter le temps qu’il doit mettre pour sortir un tissu qui répond aux exigences du marché. ‘’Du dévidoir au placement dans la chaîne de tissage, cela prend en moyenne 24 h’’, dit Monsieur Abel M. SOUMANA. En clair, il faut une journée entière pour parvenir à mettre en place le système avant de commencer le tissage proprement dit.

Comme tout métier, le tissage traditionnel connaît des difficultés qui sont propres à ce secteur artisanal.

Difficultés dans le métier de tissage

La préservation du patrimoine immatériel exige la transmission des techniques de génération en génération. Les techniques de tissage artisanal étant un héritage ancestral, il est de bon ton qu’on puisse s’assurer de sa pérennisation. Or de plus en plus on note un désintérêt des jeunes à ce métier noble. Il est donc difficile de nos jours de trouver des jeunes aspirant au métier de tissage artisanal. Ce qui inquiète les observateurs qui prédisent la disparition pure et simple de ces techniques si rien n’est fait pour susciter la jeunesse à porter un autre regard sur les métiers d’art en général, le métier de tissage en particulier.

A côté de cette difficulté d’assurer la pérennisation des techniques de tissage artisanal, on note de plus en plus la raréfaction de matières première du fait de la présence des grandes firmes industrielles. De même, il faudra penser à adapter le matériel de travail aux exigences contemporaines. ‘’ Il manque de matières premières sur place au Togo et aussi d’équipements adaptés.’’, martèle Monsieur Abel SOUMANA avant d’insister sur le manque de débouchés potentiel dans le secteur et d’appeler à trouver une solution à ses difficultés afin que le secteur du tissage retrouve toute sa noblesse.

L’histoire du tissage est ainsi contée.

Nous aurions certainement et dorénavant un autre regard sur les pagnes tissés. Nous comprendrons désormais que la valeur d’un pagne tissé est inestimable et à l’avenir qu’un pagne tissé est le fruit de la passion, de la patience et de dur labeur.

Porter un pagne tissé est porter de l’amour et du don de soi d’un talentueux et valeureux tisserand qui s’est donné à ce travail.

Du coton au tissu tissé, c’est une tradition que traverse et perse le temps malgré tout.  

Monsieur Abel SOUMANA comme d’autres tisserands et tisserandes passent leur vie à penser à notre bien-être. Ils méritent le soutien pour favoriser la floraison et la pérennisation du tissage surtout la pérennisation de nos techniques ancestrales.

Merci de soutenir et encourager ce savoir-faire ancestral en achetant les tissus tissés par nos artisans locaux qui tend à disparaitre et que sa disparition risque de nous faire perdre nos riches et fertiles traditions.